Pathogène/Epidémiologie
Pathogène : Pneumocystis jiroveci (ex-carinii) :
Agent d'une des infections opportunistes (IO) les plus fréquentes en France
- Appartient au règne des champignons
- Absence de culture possible
- Sensibilité aux antiparasitaires
Épidémiologie environnementale
- 2ème infection fongique invasive la plus fréquente (derrière les candidémies)
- Diminution de l’incidence chez les personnes vivant avec le VIH (elle constitue cependant la 1ère IO classant SIDA chez elles)
- Infection de plus en plus présente chez les autres patients immunodéprimés
- Mortalité beaucoup plus élevée chez les patients non-VIH
Physiopathologie
- Transmission aérienne, interhumaine possible, ou à partir de réservoirs environnementaux
- Infection asymptomatique chez l'immunocompétent
- Pneumocystose : réactivation lors d'une immunodepression
Clinique
Forme typique
- Evolution sub-aiguë
- Toux sèche
- Dyspnée d’intensité croissante
- Fièvre, généralement peu élevée
- Révélatrice de l'infection à VIH
- Ou survenant chez une personne avec infection connue par VIH mais ne prenant pas de prophylaxie spécifique
Forme fulminante
- Détresse respiratoire
Diagnostic à évoquer :
- Chez toute personne ayant une pneumopathie interstitielle bilatérale,
- Ne répondant pas à une antibiothérapie classique
- Ou associée à une immunodépression (infection à VIH, tranplantation d'organe, chimiothérapie pour cancer, corticothérapie au long cours, malnutrition sévère), le plus souvent sans traitement prophylactique par TMP-SMZ.
- Chez un patient VIH+, risque principal : Lymphocytes T CD4+ < 200/mm3 (100/mm3 si CV indétectable)
Auscultation pulmonaire souvent normale
Gazométrie artérielle souvent plus altérée que ne le laisse supposer le tableau clinique
LDH souvent élevées
Diagnostic
Imagerie :
- Cliché thoracique : syndrome interstitiel bilatéral
- TDM thoracique :
- Opacités en verre dépoli diffuses épargnant classiquement la périphérie
- Parfois présence de kystes, de nodules, ou de condensations.
- Elévation des LDH, classique, constitue en cas d’élévation majeure, un facteur de mauvais pronostic.
Gazométrie artérielle : hypoxémie, désaturation, évalue la gravité et le pronostic.
Diagnostic microbiologique
- Mise en évidence de kystes de Pneumocystis jiroveci en première intention
- Examen direct au microscope, examen de référence
- Nécessité d'utiliser 2 techniques complémentaires (2 colorations différenres (Gomori-Grocott, Giemsa) ou 1 coloration + IF)
- Sur LBA ou expectoration induite
- Pouvant être réalisé même après initiation, en situation d'urgence d'un traitement probabiliste par cotrimoxazole
- Examen direct au microscope, examen de référence
Le diagostic peut également reposer sur :
- PCR sur expectoration induite ou LBA si forte suspicion clinico-radiologique
- Sensible, ne peut toujours différencier colonisation et infection
- À intégrer au tableau clinique
- En pratique, l'association d'une PCR et d'une immunoflourescence négative dans le LBA élimine une
pneumocystose
- Antigène soluble bêta-(1-3)-D-glucane :
- Dosage sérique indiqué si pneumopathie fébrile de diagnostic différentiel difficile chez immunodéprimé.
- Surtout intéressant si prélévement pulmonaire (LBA non réalisable).
- Si résultat négatif : élimine infection fongique invasive (IFI)
- Si résultat positif : poursuivre investigations (LBA) pour identifier l'IFI
Traitement
Première intention : TMP/SMX (Triméthoprime + Sulfaméthoxazole (cotrimoxazole)) 15/75 mg/kg/24h en 3 prises PO ou IV (sans dépasser 12 ampoules par jour)
- Cotrimoxazole PO (TMP 160/SMX 800) : 2 cp x 3/24h ;
- Cotrimoxazole IV (TMP 80/SMX 400) : 4 ampoules IV x 3/24h, si forme sévère ou impossibilité d’utiliser la voie orale
- Durée de traitement : 21 jours
En cas de survenue d'effet secondaire grave (éruption fèbrile, hépatite, cytopénie, insuffisance rénale...) ou si contre-indication d'emblée au cotrimoxazole :
- Formes modérées :
- Atovaquone suspension (750 mg x 2/24h) pendant 21 jours au total. Prise impérative avec repas riche en graisses
- Ou aérosol quotidien de pentamidine (300 mg/24h) pendant 21 jours au total
- Formes sévères :
- Pentamidine IV ou IM (3 mg/kg/24h) pendant 21 jours au total ; surveillance glycémique ++
Traitement associé
- Corticothérapie par voie orale (prednisone 1 mg/kg/24h) ou IV (méthylprednisolone), lorsque la PaO2 est inférieure à 70 mmHg. Schéma progressivement décroissant : prednisone orale 60-80 mg/24h en 2 prises J1 à J5, puis 40 mg/24h de J6 à J10, puis 20 mg/24h de J11 à J21.
- Oxygénothérapie
- Transfert en soins intensifs si besoin (VNI ? éviter intubation ++)
Suivi
- Contrôle de la disparition du Pneumocystis jiroveci non nécessaire
- Aucune intérêt du suivi des taux sériques de BD-glucane
- Eruption fébrile allergique (sulfamide) vers le 10-12ème jour de traitement dans près de la moitié des cas (sauf si corticothérapie)
- Prophylaxie secondaire si indiquée (cf infra)
Prévention
Prophylaxie primaire
- Infection VIH : dès que CD4 < 200/mm3 ou < 15 % des lymphocytes
- Cotrimoxazole (TMP 80/SMX 400) : 1 cp/24h
- Cotrimoxazole forte (TMP160/SMX 800) : 1 cp/24h si sérologie toxoplasmose positive (prophylaxie double)
- Si intolérance et sérologie toxoplasmose négative : Aréosols pentamidine 300 mg x 1/mois
- Alternatives : Atovaquone (1 500 mg en une prise/j), Dapsone (50 mg/24h)
- Greffés de moelle et transplantés d'organe
- Cotrimoxazole (TMP 80/SMX 400) : 1 cp /24 h
- Cotrimoxazole forte (TMP 160/SMX 800) : 3 cp / semaine
- Durée : 6 mois chez greffés moelle, rein, plus prolongée chez transplantés pulmonaires (au moins 1 an)
Prophylaxie secondaire
- Infection VIH
- Comme la prophylaxie primaire
- À poursuivre jusqu'à obtention taux de CD4 > 200/mm3 et > 15 % à 3 mois d'intervalle, ou CD4 > 100/mm3 et charge virale indétectable > 3 mois
- Autres immunodépressions profondes
- Cotrimoxazole
- Durée mal codifiée
Autre information
- SI Pneumocystose révalatrice de sida : initation rapide (délai au maximum de 15 jours) du traitement antirétroviral (cf Stratégie de traitement ARV)
- Prise en charge du VIH – Recommandations du groupe d’experts 2018