Aller au contenu principal de ePOPI

Maladies Infectieuses et Tropicales

Guide de traitement - Référence pour une bonne pratique médicale

CH Brive connecté - déconnexion - jeudi9mai/05/2024

Arthrite septique

Pathogène/Epidémiologie

Incidence : 6 / 100 000 habitants / an en France (infection ostéo-articulaire la plus fréquente)

Arthrite aiguë hématogène

Arthrite aiguë par inoculation directe

Clinique

Il s'agit le plus souvent d'une monoarthrite aiguë d'une grosse (genou, hanche) ou d'une petite articulation (atteinte pluriarticulaire dans 10-17% des cas).

Evoquer systématiquement une endocardite infectieuse si arthrite hématogène à S. aureus ou polyarthrite.

  • Signes locaux : 
    • Douleur articulaire
    • Impotence fonctionnelle
    • Signes inflammatoires avec gonflement articulaire sauf si l’articulation est profonde
  • Frissons et fièvre (cependant absente dans 50% des cas)

Diagnostic

Urgence diagnostique en raison de la morbi-mortalité et du risque fonctionnel secondaire aux dommages structuraux.

1. Ponction articulaire (éventuellement guidée par l’échographie (hanche) ou la TDM)

  • Analyse cytochimique
    • Envoi du liquide synovial dans un tube EDTA ou hépariné
    • Aucun seuil leucocytaire parfaitement disciminant entre arthrite septique et autres arthrites inflammatoires. Toutefois, les seuils suivants peuvent être spécifiés :
      • Plus de 50 000 éléments/mm3 (sensibilité 50%, spécificité 80-90%), pathognomonique si plus de 100 000/mm3 (spécificité > 95%)
      • Plus de 90 % de polynucléaires neutrophiles souvent altérés
    • Aucun autre marqueur biochimique n'est suffisament disciminant pour être recommandé.
    • Recherche systématique de cristaux pour le diagnostic différentiel avec l'arthrite microcristalline (leur présence n'éliminant toutefois pas le diagnostic d'arthrite septique)
  • Analyse microbiologique : réalisée avant tout traitement antibiotique
    • Recueil sur poudrier stérile (ou tube sec), et si possible ensemencement sur flacons d'hémocultures
    • Identification de l'agent infectieux par examen direct (positif dans 1/3 des cas) et cultures
    • Biologie moléculaire : PCR universelle moins sensible que l'examen direct et la culture, PCR spécifiques selon le contexte 

 

  • Autres examens
    • Hémocultures (avant toute antibiothérapie), positives dans 9-36% des cas
    • Bilan inflammatoire (hémogramme, CRP)
    • Sérologies si le contexte le justifie (borréliose, brucellose, …)
    • Prélèvement de la porte d’entrée éventuelle selon le contexte (ECBU)
    • Biopsie de synoviale : absence de supériorité pour l'identification bactériologique par rapport à l'analyse du liquide synovial, sauf dans certains cas particuliers (infection à mycobactérie) ou en l'absence de liquide ponctionnable

 

2. Imagerie

  • Radiographie le plus souvent normale au début, réalisée comme référence pour le suivi, éliminer un diagnostic différentiel et rechercher une pathologie articulaire sous-jacente
  • Echographie : non systématique, utile pour mettre en évidence la présence de liquide intra-articulaire, même en petite quantité, en particulier dans des articulations d’examen clinique difficile comme la hanche, permet de guider la ponction
  • IRM : à réserver à des localisations spécifiques (symphyse pubienne, sacro-iliaques)
  • Echographie cardiaque : systématique en cas de suspicion clinique d'endocardite infectieuse, ou d'arthrite à Staphylococcus aureus, streptocoques oraux non groupables, Streptococcus gallolyticus ou entérocoque

Traitement

Drainage en urgence (si possible avant toute antibiothérapie)

  • Ponction-aspiration initiale à l'aiguille à visée diagnostique et thérapeutique, devant être répétée tant que nécessaire en cas de reconstitution de l'épanchement
  • Lavage articulaire chirurgical arthroscopique, pouvant être proposé d'emblée (absence de différence sur le pronostic en comparaison aux ponctions itératives), notamment pour les articulations difficilement ponctionnables, ou en cas d'échec des ponctions itératives et de l'antibiothérapie initiale (alors associé à une synovectomie). L'arthrotomie lavage doit être évitée car associée à un plus mauvais pronostic fonctionnel.

Antibiothérapie de l'arthrite aiguë hématogène de l'adulte

  • Antibiothérapie probabiliste : à débuter seulement en cas de signes de gravité (sepsis), ou de liquide synovial franchement purulent et sans cristaux en analyse biochimique. Dans les autres situations, attente des résultats microbiologiques
    • Avant 70 ans (prédomminance de S. aureus sensible à la méticilline et de streptocoques) : céfazoline IV 80-100 mg/kg/jour en 3 perfusions quotidiennes ou IVSE après une dose de charge de 30 mg/kg en 1 heure
    • Après 70 ans (plus forte fréquence des BGN) : ceftriaxone IV 2 à 4 g/j en 1 à 2 perfusions/j ou céfotaxime IV 150-200 mg/kg/j en 3 perfusions/j
    • ± gentamicine 8 mg/kg/24h, IV,  en 1 administration par jour à la phase initiale du traitement, uniquement en cas de signes de gravité (sepsis, choc septique)
  • Antibiothérapie après identification de l'agent infectieux (Cf. tableaux ci-dessous).
  • Durée : 4-6 semaines (sauf arthrite gonococcique : 7 jours)

Antibiothérapies proposées au cours des infections ostéoarticulaires documentées de l’adulte ayant une fonction rénale normale

Agent infectieux

Antibiothérapie parentérale
de 1ère intention

Alternatives parentérales (selon les données de l'antibiogramme)

Relais oral en fonction des données de l'antibiogramme

 Staphylocoque
 méti-S

Oxacilline

OU Cloxacilline

OU Céfazoline

Allergie vraie aux bétalactamines :

Vancomycine

OU Daptomycine

Bithérapie parmi les molécules suivantes, selon l’antibiogramme :

Staphylocoque méti-R

Vancomycine si CMI vancomycine < 1,5 mg/L

SINON Daptomycine 

Teicoplanine 

 

Streptococcus spp.

Amoxicilline 

Ceftriaxone 

OU Céfotaxime

Si allergie vraie aux béta-lactamines : Vancomycine

Amoxicilline 

OU Clindamycine

OU Lévofloxacine

Enterococcus spp.

Amoxicilline

Si résistance à l’amoxicilline ou allergie vraie aux béta-lactamines : Teicoplanine

OU Vancomycine

OU Linézolide/Tédizolide

 

Entérobactéries

Ceftriaxone

OU Céfotaxime

OU Céfépime (entérobactéries du groupe 3 : Enterobacter spp., Serratia spp., Morganella spp.)

Si résistance aux céphalosporines, selon antibiogramme :

Imipénem

OU Méropénem 

OU Ertapénem 

OU Céfépime

Ofloxacine

OU lévofloxacine

P. aeruginosa

Pipéracilline-tazobactam

OU Ceftazidime )

+ Ciprofloxacine 

Céfépime

OU si résistance aux autres bêtalactamines :
Imipénem ou Méropénem

Ciprofloxacine

C. acnes

Amoxicilline

 

Amoxicilline

OU Clindamycine

Anaérobies

Selon antibiogramme

 

Métronidazole

Polymicrobiennes

Avis Spécialisé

 

Avis Spécialisé

Candida spp.

Fluconazole 

OU Caspofungine 

 

Fluconazole (durée prolongée)

Mycobactéries du complexe tuberculosis

Cf. tuberculose

   

Brucella spp.

Doxycycline + rifampicine +, pendant 7 à 14 jours, : gentamicine

Doxycycline + ciprofloxacine

 

 

Posologies des antibiotiques utilisés au cours des infections ostéoarticulaires de l’adulte

Antibiotique (voie d’administration)

Posologie (/24 h) (adulte)

Rythme d’administration

ß-lactamines

Amoxicilline (PO, IV)

IV : 150 à 200 mg/kg/24h sans dépasser 16 g/24h

PO : 4,5 à 6g/j 

IV : en 4 à 6 administrations ou perfusion continue (dose journalière divisée en 3 perfusions de 8h après dose de charge de 2 g sur 1h)

PO : 3 prises quotidiennes

Cloxacilline ou Oxacilline (IV)

150-200 mg/kg/24h sans dépasser 16 g/24h

En 4 à 6 administrations ou perfusion continue après une dose de charge de 2 g sur 1h

Céfazoline (IV)

80-100 mg/kg/24h 

En 3 administrations ou en perfusion continue après une dose de charge de 30 mg/kg sur 1h

Céfotaxime (IV)

75-100 mg/kg/24h

En 3 à 4 administrations

Ceftriaxone (IV, IM, SC hors AMM)

50 à 70 mg/kg/24h (2 à 4 g/j)

En 1 à 2 administrations

Ceftazidime (IV)

75-100 mg/kg/24h

En 3 à 4 administrations ou perfusion continue après une dose de charge de 2g sur 1 heure

Imipénème (IV)

2 à 3 g/24h

En 3 à 4 administrations

Glycopeptides -  Posologies à adapter secondairement aux taux sériques

Vancomycine (IV)

30-40 mg/kg/24h,
puis selon taux sériques résiduels (cible 20-25 mg/L, 30 mg/L si staphylocoque avec CMI au seuil de sensibilité)

Toutes les 12 h, ou en perfusion continue sur VVC ou piccline

Teicoplanine (IV, IM, SC hors AMM)

6-12 mg/kg/24h après dose de charge, puis selon taux sériques résiduels (cible 20 mg/L, 30 mg/L si staphylocoque avec CMI au seuil de sensibilité)

Toutes les 24 h, après 5 doses de 6-12 mg/kg toutes les 12 h

Fluoroquinolones (IV, PO)

Ofloxacine

400 (à 600 mg)/24h

En 2 à 3 prises

Ciprofloxacine

1 500 à 2 000 mg/24h PO ;
1 200 mg/24h IV

En 3 prises

Lévofloxacine

500 à 1000 mg/24h

En 1 à 2 prises

Divers

Doxycycline (PO)

200 mg/24h

En 1 à 2 prises

Rifampicine (IV, PO)

600 à 1200 mg/24h

En 1 à 2 prises, à distance des repas

Clindamycine (IV, PO)

1,8 à 2,7 g/24h

En 3 ou 4 prises avec repas ou collation

Acide fusidique (IV, PO)

1 500 mg/24h

En 3 prises

Cotrimoxazole (IV, PO)

480 mg/2400 mg/24h à 640 mg/3200 mg/24h

En 2 à 3 prises

Linézolide (PO)

1200 mg/24h

En 2 prises

Tédizolide (PO)

200 mg/24h

En 1 prise

Daptomycine (IV)

8-10 mg/kg/24h

En 1 administration

Ertapénème (IV, SC hors AMM)

1 à 2 g/24h

En 1 ou 2 administrations

Méropénème (IV)

4 à 6 g/24h

En 3 administrations

Imipénème (IV)

2 à 4 g/24h

En 2 à 4 administrations

 

Traitements associés

  • Immobilisation antalgique en position de fonction, pour une durée la plus courte possible
  • Prise en charge rééducative la plus précoce possible, passive puis active, pour récupération/maintien des amplitudes articulaires
     

Place des CRIOAc (centres de référence pour la prise en charge des IOA complexes) 
Les formes complexes doivent au minimum bénéficier d'un avis au cours d'une RCP d'un CRIOAc, ou être prises en charge directement dans ce centre de référence. 

Les IOA nécessitant un avis en CRIOAc sont celles répondant aux critères de complexité suivants : 

  • Selon le type de programme chirurgical : situations chirurgicales nécessitant des gestes majeurs d'excision, de couverture, de reconstruction osseuse ou prothétique
  • Selon la prise en charge thérapeutique antérieure : situation d'échec de première(s) prise(s) en charge
  • Selon la microbiologie : microorganisme particulier, germes résistants ou allergie(s) aux antibiotiques limitant les possibilités thérapeutiques
  • Selon le terrain : toute défaillance viscérale sévère interférant avec le programme thérapeutique

 

Autre information